Marla est un chiot femelle stérilisée de 6 mois présentée en Dermatologie pour des dépilations circulaires sur la totalité du corps.
Elle vit seule en maison avec un accès à l’extérieur, est promenée tous les jours en ville et dans des parcs ou elle peut être en contact avec d’autres chiens. Elle est nourrie avec une alimentation industrielle sèche de gamme vétérinaire et reçoit de temps en temps des restes de table. Elle est traitée contre les parasites externes avec une pipette tous les mois depuis son jeune âge. La vermifugation et la vaccination sont à jour.
Depuis 3 mois, ses propriétaires ont observé des dépilations circulaires sur le corps, associées à des rougeurs, des pellicules et un poil gras. La chienne se gratte de manière modérée, et les lésions s’étendent ; elles concernent lors de sa présentation la totalité du tronc, le poitrail et les pattes avant.
Sur le plan général, elle va bien ; elle garde un bon appétit, ne souffre pas de troubles digestifs, ni respiratoires.
Aucune contagiosité à l’homme ou aux autres animaux n’est rapportée par les propriétaires.
Un premier traitement anti-inflammatoire et des shampooings calmants n’ont pas permis d’amélioration.
***
A l’examen cutané, on observe des dépilations avec un aspect « mité » généralisées au corps, au ventre et au poitrail. Ces lésions sont inflammatoires, parfois crouteuses. Des « points noirs » sont observés à l’examen rapproché et les pellicules sont bien présentes. Sur ces zones rondes sans poil, la peau paraît plus foncée. Sur le poitrail, les lésions sont plus rouges, crouteuses, et le poil est cassé (Figures 1 et 2).
Marla ne présente pas d’otite, pas d’inflammation des doigts et ne semble pas gênée par cette affection.
Figure 1. Pelage avec un aspect mité, dépilations circulaires et hyperpigmentation cutanée.
Figure 2. Poitrail et antérieur gauche, pertes de poils, rougeurs, croutes.
Les prélèvements de poils par raclages cutanés et trichoscopies ainsi que leur observation au microscope permettent de mettre en évidence des parasites vermiformes, assez longs, munis de 4 paires de pattes. Ils sont appelés Demodex canis(figure 3). On peut également observer sur la lame, des œufs et des larves de parasites. Les tiges pilaires, en revanche ne présentent pas d’anomalie particulière.
Figure 3. Demodex canis adulte observés au microscope à proximité d’un poil (objectif X 10).
Les prélèvements de surface mettent également en évidence de nombreuses bactéries en particulier sur le poitrail.
***
Compte-tenu de l’historique, de l’examen cutané et des résultats des examens complémentaires, le diagnostic est posé : Marla présente une démodécie juvénile à Demodex canis secondairement surinfectée par des bactéries en surface.
Un traitement acaricide est mis en place sans attendre pour tuer ces parasites. Des shampooings antiseptiques à base de chlorhexidine sont prescrits deux fois par semaine.
Au contrôle à 1 mois, le pelage repousse, aucune nouvelle lésion n’est rapportée et le poitrail est moins inflammatoire. Les prélèvements de poils ne mettent pas en évidence de parasites ni de formes juvéniles. Les traitements sont poursuivis à l’identique.
Au contrôle à 2.5 mois, le pelage a repoussé complètement, aucune inflammation n’est observée et la chienne va bien (figures 4 et 5). Aucun parasite n’est observé à ce 2ème contrôle sur les prélèvements. Les cytologies ne montrent pas de surinfection bactérienne. Marla est considérée guérie.
Figures 4 et 5. Résolution des lésions, absence de dépilations et d’inflammation.
***
La démodécie, maladie parasitaire causée par un acarien le Demodex, est observée chez le chien et plus rarement chez le chat.
Chez le chien, les jeunes sont plus souvent concernés, leur système immunitaire n’étant pas encore compétent ; on appelle cette maladie la démodécie juvénile. Il existe des races prédisposées comme le carlin, le bouledogue, le staffie et autres.
Le Demodex est transmis de la mère au chiot dans les 3 premiers jours de vie. Il colonise le follicule pileux et les glandes sébacées, étouffe le poil et entraîne une dépilation lorsque le système immunitaire est fragile.
Le plus souvent il n’y a pas de démangeaisons associées, sauf en cas de surinfection bactérienne secondaire comme dans le cas de Marla. Cette surinfection aggrave la démodécie et doit être prise en charge de manière concomitante.
Le traitement de la démodécie se base sur l'utilisation de médicaments acaricides sous forme de pipettes ou comprimés qui sont le plus souvent bien tolérés. Les suivis mensuels sont nécessaires pour évaluer l'efficacité du traitement. On considère un animal guéri après 2 prélèvements de poils négatifs à un mois d'intervalle. Le pronostic de la démodécie juvénile est généralement bon.
Les anti-inflammatoires de type corticoïdes sont contre-indiqués et peuvent entrainer une prolifération plus importante de parasites.
Lorsque les adultes sont concernés, la recherche d’une maladie concomitante est nécessaire (fragilisation du système immunitaire) et identifiée dans 50% des cas environ.
Cette maladie parasitaire n’est pas contagieuse aux autres animaux, ni à l’homme. La stérilisation des femelles atteintes est recommandée pour limiter la transmission de ces parasites.
Comments